SYLVAIN MAESTRINI, PRÉSIDENT DU BHNM, DÉÇU POUR SON CLUB

Dans une lettre*, que vous pouvez lire après l'interview, les joueuses de la D2F, antichambre de la Ligue Butagaz Energie comptant plus de 40% de joueuses professionnelles, ont exprimé leur mécontentement à la Fédération Française de Handball. Leurs présidents voulaient continuer à jouer même à huis clos mais le ministère des sports en a décidé autrement. Bouillargues ne rejouera donc pas avant début 2021 et son président Sylvain Maestrini en forcément très déçu. 

JS30: La FFHB a rendu sa décision concernant le championnat de D2F, quel est le sentiment qui prédomine ?

SM: C’est un sentiment de frustration, et une grosse déception. Le groupe a travaillé dur depuis mi-juillet pour être prêt à la rentrée et pour faire une grosse saison et là tout s’arrête brutalement. Nous sommes conscients que nous vivons une crise sanitaire très dure mais regarder un match même à la télé ou sur les réseaux sociaux permet aussi un moment de détente et rompt un peu l’isolement.    

JS30: Vous vous étiez préparés à toutes les éventualités mais surtout celle de continuer à jouer ?

SM: Oui nous avions imaginé de jouer à huit clos et de pouvoir retransmettre nos matchs. Les filles s’étaient faites à l’idée de jouer sans public, même si ce n’est pas les conditions idéales. C’est regrettable pour nos supporter et bénévoles.

JS30: Quel a été ton discours envers les filles ?

SM: Dans ces moments difficiles je demande beaucoup de solidarité qui est déjà la base d’un sport d’équipe. Nous devons nous serrer les coudes dans cette période bien difficile et même si nous sommes très déçus cela ne reste qu’un jeu. Nous devons penser aux malades et surtout à tous les personnels qui se battent tous les jours pour faire reculer cette maladie.  

JS30: Maintenant quel est le programme devant tant d’incertitudes ?

SM: Notre programme est très simple, nous n’allons pas détruire tout le travail réalisé par Delphine, Olivier et les filles. Nous allons continuer à travailler et à nous entrainer pour ne pas, encore une fois, recommencer une préparation physique. Nous allons aussi nous battre pour faire reconnaitre le travail et les sacrifices des filles pour évoluer à ce niveau-là.


*” Nous avons bien pris en compte votre décision de suspendre le championnat de D2F que vous considérez comme « non-professionnel ».

Sachez que derrière l’intitulé « D2F », se cachent des femmes qui étudient ou travaillent, certaines d’entre-elles sont d’ailleurs mamans. Quelques-unes ont quitté leur pays natal, d’autres leur région d’origine, pour pouvoir vivre de leur passion au plus haut niveau possible.

Leurs journées sont rythmées par les contraintes, les obligations, mais aussi les entraînements qu’elles continuent de suivre avec passion et ferveur. Ces entraînements, ils sont parfois quotidiens, parfois biquotidiens. Ils mêlent pratique, préparation physique et tactique, et analyse vidéo. Ils sont dirigés par des entraîneurs diplômés, professionnels, et qui ont au même titre que les joueuses l’objectif de performer et de proposer du spectacle dans
les différents gymnases de France.

Vous comprendrez qu’il s’agit ici bien plus qu’un passe-temps où qu’un loisir, mais bien d’une pratique de très haut-niveau, permettant de fournir chaque année les clubs de l’élite française et internationale, ainsi que les sélections nationales.

La D2F c’est aussi une division composée de plusieurs clubs VAP (Voie d’Accès au Professionnalisme), soumis à un cahier des charges précis que vous avez mis en place. Que dire maintenant à ces clubs qui se sont engagés dans une démarche professionnelle, qui se sont structurés, qui ont investi ?

La D2F c’est plus de 80 contrats professionnels de joueuses (dont bien plus de la moitié sont à temps complet), sans parler du nombre de contrats professionnels au sein des staffs techniques et des personnels administratifs. Avez-vous pensé aux conséquences sociales, économiques, conventionnelles ?

En D2F, se côtoient plusieurs statuts : joueuses professionnelles, à temps plein, à temps partiel, joueuses sous convention, partenaires entraînements. Mais sachez que l’investissement humain par les joueuses, par l’encadrement est calqué sur l’investissement requis par une division professionnelle. Ce sont les mêmes nombres d’heures d’entrainement, les mêmes bénévoles qui œuvrent au quotidien à l’organisation et au bon déroulement des rencontres le week-end. Ce sont les mêmes présidents qui se démènent à monter des projets viables qui permettent aux joueuses de se développer et de proposer un niveau de jeu qui attire le public.

Mesdames, Messieurs, vous comprendrez donc bien notre déception et notre incompréhension quant à la suspension du championnat, lorsque l’on parle d’un environnement sportif et humain, qui semble ne prendre en compte qu’un aspect financier caché derrière des quotas, des statistiques, des pourcentages. Le ministère avait donné délégation aux fédérations pour maintenir ou non la compétition ; nous pensions que votre considération pour la deuxième division féminine nationale au vu des critères listés ci-dessus, des cahiers des charges que vous avez mis en place, aurait été différente. Sachez que cette décision fédérale communiquée par un courriel de trois lignes sans explication nous déçoit réellement.

Nous nous étonnons également que dans le cadre de prise de décisions si lourdes de conséquences pour les acteurs, les joueuses, les entraîneurs, et parfois les clubs, ne soient pas représentés dans les discussions, ni même consultés de manière transparente. Des structures représentatives existent, et pourtant, malgré leurs sollicitations souvent laissées sans réponse, les décisions se prennent sans considération des acteurs de cette division. Une telle crise ne serait-elle pas l’opportunité de revoir votre mode de gouvernance, de consultation, de décision, afin que le handball français, le handball féminin, la D2F sortent grandis d’une épreuve comme celle que nous sommes en train de vivre ?

Il est du devoir de la fédération française de handball de promouvoir le sport féminin et de récompenser l’investissement sans relâche de centaines d’individus, qu’il s’agisse de joueuses, entraîneurs, de présidents, de vice-présidents, de trésoriers, de bénévoles, d’intendants, et la liste pourrait s’allonger. Pour conclure, nous nous permettons de rappeler que tout a été mis en œuvre pour respecter les protocoles sanitaires et assurer la sécurité des différentes équipes engagées dans le championnat. Cet engagement est bien sur toujours d’actualité et peut même être intensifié si en dépend l’avenir de notre saison. Dans cette situation difficile, l’union est importante et votre reconnaissance aussi.

En vous adressant nos salutations distinguées.”

Avec le soutien de l’AJPH, une joueuse des clubs suivants a représenté ses coéquipières par sa signature: Noisy-le-Grand, Bègles, Rochechouart-Saint-Junien, Octeville, Sambre-Avesnois, Bouillargues, Celles-sur-Belle, Clermont-Ferrand, Saint-Grégoire-Rennes, Vaulx-en-Velin, Saint-Maur, Le Havre, Achenheim et Cannes-Mandelieu.


 

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